Actualité des fouilles
Printemps 2021
Mur d’enceinte – Les Mottes, Pré Raclos
Des travaux pour la pose de conduites électriques dans la zone industrielle de la Plaine ont été l’occasion d’explorer en mars 2021 des terrains situés au nord-est du site, entre la voie CFF Avenches-Morat et la muraille romaine, secteur peu touché par des fouilles récentes.
Lors du franchissement en pousse-tube de la voie ferrée, le sous-sol s’est révélé entièrement remanié suite aux fouilles menées ici à plusieurs reprises à la fin du 19e s. Aucun élément en lien avec le site funéraire des Mottes (Pré Raclos) découvert en 1873 lors de la construction du chemin de fer n’a par conséquent été mis en évidence. Le suivi des travaux a eu pour principal résultat le repérage d’une voie romaine longeant la muraille à l’extérieur de celle-ci, entre la route du Port antique et la porte du Nord-Est, distantes de 250 m. La chaussée se présente comme une chape de galets et de graviers épaisse de 50 cm, reposant sur un solide radier de galets et de boulets de rivière. Son niveau de marche se situe à l’altitude moyenne de 435,80, soit dès 40 cm seulement sous le terrain actuel. Immédiatement bordée au nord par un fossé large d’env. 1,50 m et profond d’un demi-mètre, sa largeur devait atteindre env. 5,50 m. Cette voie repose directement sur le niveau de chantier de la muraille ce qui tend à indiquer que son aménagement a suivi de peu la construction de l’enceinte. L’absence constatée de fossé défensif confirme ce qui a déjà été observé en d’autres occasions pour tout le secteur compris entre la porte du Nord-Est et la porte du Nord. Sur le site d’Avenches, une autre chaussée bordant le flanc extérieur de la muraille était déjà connue au sud de la porte de l’Est. Associée dans ce secteur-là au fossé défensif, cette via vallaris, large de 6 m dans son état final, est également ici clairement postérieure à construction de la muraille.
Lors de cette fouille, cinq grands blocs en grès qui couvraient à l’origine les merlons du parapet de l’enceinte ont été mis au jour. Ils s’apparentent tant par leurs dimensions standardisées que par leur facture à l’ensemble des blocs de fonction identique provenant d’autres points du tracé de l’enceinte.
Près de 3 m3 de moellons de calcaire jaune soigneusement équarris ont également été récupérés. Pour une partie d’entre eux, leur surface légèrement arrondie indique qu’ils proviennent de l‘effondrement du parement extérieur d’une tour. Ces pierres seront utilisées pour les travaux de restauration de la muraille en cours.
Eté 2020
Derrière les Murs
Une campagne de sondages de diagnostic et de fouilles a été menée entre juin et septembre 2020 au lieu-dit Derrière les Murs dans le cadre de l’extension de la ZI de la Plaine. Il s’agissait notamment de préciser les limites d’une petite nécropole découverte extra muros près de la porte du Nord lors d’une première opération de sondages en 2016. Des fossés drainants liés à l’édification de l’enceinte Les vestiges les plus anciens remontent au dernier tiers du 1er s. ap. J.-C. et consistent en un réseau de fossés visant à drainer les zones basses de ce secteur de plaine. Le dispositif comprend notamment un fossé rectiligne parallèle à l’enceinte, observé sur plus de 300 m (St 1). Celui-ci s’infléchit vers le nord à la hauteur de la tour T 17, en raison peut-être de la présence de constructions situées en bordure de la voie sortant de la ville par la porte du Nord. Il ne semble pas se prolonger vers l’ouest au-delà de la tour T 22.
Il est contemporain de deux autres fossés perpendiculaires à l’enceinte. Le premier (St 24) se situe face à la tour T 19 et le second (St 22) est implanté 45 m plus au nord-est, distance qui équivaut approximativement à la moitié de l’intervalle séparant deux tours sur ce tronçon de la muraille. Il semble donc bien que la répartition de ces structures drainantes réponde de façon régulière et systématique à l’emplacement des tours. Leur comblement contenait de nombreux blocs de calcaire jaune grossièrement équarris habituellement employés pour le blocage interne de la muraille. Le rejet de ces matériaux de construction non utilisés dans ces fossés en indique l’abandon à l’issue du chantier de la muraille. Daté du dernier tiers du 1er s. de notre ère, le mobilier céramique qui en provient s’accorde bien avec la période d’édification de cette partie de l’enceinte vers 76 ap. J.-C.
Évacuation hors les murs des eaux usées de la ville
Cette intervention a également permis de repérer de nouveaux aménagements liés à l’évacuation extra muros des eaux usées d’Aventicum et de compléter ainsi le réseau des canalisations repérées de part et d’autre de la muraille en 2015 et 2016 et qui caractérisent la deuxième phase d’occupation à la fin du 1er s. de notre ère.
A la hauteur de l’aqueduc 1, l’un des deux conduits traversant la base de la muraille documentés par L. Bosset en 1924, deux fossés successifs (St 20 et St 4) ont été observés sous forme de cuvettes accolées très évasées, dont la plus ancienne (St 20) se trouve exactement dans l’axe de l’émissaire. La seconde (St 4) large de 2,40 m et décalée de 2 m par rapport à l’aqueduc 1, se poursuit au nord-ouest sur une distance d’au moins 95 m au-delà du mur d’enceinte. La régularité de son tracé rectiligne laisse supposer la présence initiale d’un aménagement en bois. Attestée intra muros en 2015 sous forme d’un conduit maçonné reposant sur des pieux de chêne, sa construction est datée par dendrochronologie des années 89-90 ap. J.-C. Situé entre la fin du 1er s. et le 3e s. ap. J.-C., le mobilier archéologique provenant du comblement des deux fossés St 4 et St 20 tend à valider cette datation tout en démontrant que l’égout est resté en fonction durant les occupations suivantes. Délimitée par deux piédroits maçonnés, une autre canalisation d’évacuation a été repérée à la hauteur de la tour T 18 (St 3). Son orientation n’est pas perpendiculaire à la muraille puisqu’elle forme un angle de 64° par rapport à celle-ci. Son tracé intra muros a pu être restitué grâce à la présence, juste de l’autre côté de la muraille, d’une structure en creux observée en 2015 dans un sondage ouvert à l’emplacement supposé de la tour T 18 (qui reste non attestée archéologiquement !). Ce collecteur peut en outre être hypothétiquement prolongé jusqu’aux quartiers d’habitat : au prix d’un léger fléchissement de son tracé, il se situe en effet assez précisément dans l’axe d’une canalisation maçonnée dégagée en 2005 et 2010 en limite de la zone urbanisée d’Aventicum, à 120 m de là vers le sud-est.
La canalisation St 3 se situe à égale distance - soit 130 m - des aqueducs 1 et 2 relevés de part et d’autre par L. Bosset, renforçant l’hypothèse d’une mise en œuvre à intervalles réguliers des conduites d’évacuation des eaux usées au travers de la muraille. Un quatrième canal situé à 8 m au nord-est de la tour T 21, soit à 130 m de l’aqueduc 2 s’intègre d’ailleurs lui aussi à ce dispositif. Il est matérialisé par une structure que L. Bosset décrit en 1926 comme un « fond d’aqueduc en dalles de pierre grise installées en oblique à travers les fondations du mur d’enceinte ». Enfin, une quatrième canalisation (St 50), contemporaine des précédentes, a été mise au jour à une trentaine de mètres de la route franchissant la porte du Nord (St 50). Conservés sur une longueur de 3 m seulement, ses deux piédroits, larges de 55 cm, délimitent un canal d’écoulement de 35 cm de largeur dont le fond ne présente aucune trace d’aménagement particulier. Son implantation planimétrique et stratigraphique l’apparente aux autres structures du réseau d’évacuation des eaux usées. De son comblement provient une bague en alliage cuivreux portant sur son chaton l’inscription AMO TE / AMA ME, « Je t’aime. Aime-moi ! », qui vient s’ajouter aux quelques rares autres bagues inscrites des collections d’Avenches.
Une nécropole du 2e s. de notre ère
La troisième période d’occupation est celle de la fréquentation au 2e s. ap. J.- C. du petit cimetière découvert en 2016 et dans lequel une proportion inédite d’immatures avait été relevée. L’intervention de 2020 a apporté des informations quant à son extension par la découverte d’un niveau de circulation de graviers et de galets (St 16) contemporain des tombes et de fossés d’enclos. Trois fossés rectilignes (St 5, St 12 et St 36), larges de 1,10 m à 1,40 m pour une profondeur maximum de 25 cm, marquent les limites, peut être sous forme de haies, de cette aire funéraire de forme carrée qui atteint donc près de 260 m2. Seules deux inhumations en pleine terre de nouveau-nés (St 6 et St 13), un épandage d’ossements d’immatures (St 19) et la tombe en réduction d’un adulte en position secondaire (St 15), tous dans un mauvais état de conservation, sont venus s’ajouter aux sépultures déjà fouillées en 2016.
Très varié et abondant, le mobilier archéologique associé au niveau de circulation du secteur fouillé est constitué de tessons de céramique, de restes fauniques, d’éléments métalliques, de fragments de verre, d’éléments de tabletterie, d’objets en terre cuite ou en pierre et d’ossements humains épars, le tout en grande partie brûlé. Le mobilier céramique est daté pour l’essentiel de la fin du 1er au 3e s. ap. J.-C., suggérant une assez longue période de fréquentation. S’y trouvaient trois estampilles, rares dans nos contrées, dites in planta pedis, puisque caractérisées par un cartouche en forme de pied ou de sandale incluant le nom du producteur, en l’occurrence probablement Catus.
Activités de boucherie ?
La dernière phase d’occupation antique, non datée précisément mais postérieure à la nécropole, compte un ensemble de plusieurs fosses (St 7, St 10, St 14, St 34, St 39) dont le comblement comprend de nombreux restes d’animaux de grande taille (bovidés, équidés). De multiples traces de découpe tendent à associer ces dépotoirs à une activité de boucherie. Les os, parmi lesquels se trouvent plusieurs chevilles osseuses sciées, pourraient également avoir été exploités à des fins artisanales (tabletterie).
Les structures post-antiques et modernes
À l’ultime phase de fréquentation des lieux se rapportent une quinzaine de structures non précisément datées. Il s’agit notamment de fossés et de plusieurs canalisations en terre cuite, en fonte et en plastique. Des datations par radiocarbone ont confirmé l’implantation moderne d’un alignement de piquets. Le mobilier archéologique associé comprend un mélange d’objets des époques romaine et médiévale ainsi que de nombreux éléments modernes en verre, en plastique et en métal. Les parcelles explorées en 2020 ont été remblayées durant les premiers mois de 2021, mettant un terme aux investigations de terrain dans ce secteur. Le périmètre classé bordant la muraille antique ne devrait pas être affecté par ces travaux, protégeant ainsi les structures funéraires qui s’y trouvent encore.
Automne 2019
Découvertes exceptionnelles dans l’antique quartier de l’insula 3
Entre les mois de mars et septembre de cette année, une importante équipe d’archéologues a été mobilisée pour la réalisation d’une fouille préventive d’envergure sur une parcelle qui verra prochainement la construction d’un pôle médical. D’une surface de près de 800 m2, la zone impactée est située dans la partie sud de l’insula 3, en bordure de la rue qui la sépare de l’insula 9, un quartier d’habitation archéologiquement encore peu connu. Les importantes investigations archéologiques menées à proximité dans les années 2000, notamment sous le centre commercial de la Migros, mais surtout à l’emplacement de la centrale du chauffage à distance, avaient déjà révélé la présence dans ce secteur de grandes et luxueuses demeures romaines, laissant présager un sous-sol dense en vestiges archéologiques. La richesse de la domus mise au jour cette année était en réalité déjà pressentie puisqu’une fouille menée dans le sud de ladite parcelle vers la fin des années 1970 avait révélé des sols en béton de belle qualité, ainsi que des parois avec des restes de peintures murales encore conservées. Outre la vérification du calage topographique des vestiges de 1970, l’intervention de 2019 a permis de compléter partiellement le plan de cette vaste demeure, avec ses mutations architecturales et fonctionnelles entre le Ier et le IIIe s. ap. J.-C. et la découverte d’une zone artisanale dont la fonction reste encore à définir. La mise en phase des structures et les études de mobilier ne faisant que débuter, les résultats présentés dans cette actualité sont préliminaires.
Des traces de l’âge du Bronze
L’excavation de grande profondeur dictée par l’aménagement de caves sous le futur bâtiment a révélé, au sommet des sables naturels, un paléosol sur lequel quelques concentrations charbonneuses éparses et des tessons de céramique à pâte grossière étaient dispersés. La découverte d’une pointe de lance en alliage cuivreux fait remonter cet horizon à l’âge du Bronze, pour l’instant sans plus de précision. Aucun aménagement de type trous de poteau pouvant appartenir à des constructions en bois n’est attesté, bien que cette couche ait été décapée sur la totalité de la surface. Une tache informe rubéfiée incluant quelques galets éclatés au feu est le seul témoignage concret d’une occupation, vraisemblablement épisodique.
Un premier bâtiment associé à une activité artisanale
Les vestiges romains sont stratigraphiquement séparés de l’horizon ancien par une épaisse colluvion naturelle. Un premier bâtiment à ossature en bois reposant sur de gros boulets dont les murs étaient montés en torchis et déjà décorés de peinture murale, a été repéré dans la partie sud de la fouille. Des sols en terre battue forment les niveaux de circulation auxquels sont associés des foyers sur sole en tegulae. Si la fonction de ce bâtiment n’est pas encore déterminée, il entretenait certainement un lien étroit avec les activités artisanales qui se développaient à l’arrière. En effet, plus d’une dizaine de cuves circulaires (diamètre moyen de 80 cm), ovales et quadrangulaires (de 1 à 4 m de côtés) ont été mises au jour. Certaines communiquent entres elles par d’étroits canaux utilisés soit pour la vidange ou le curage de ces structures, soit pour les alimenter en eau. Le ravitaillement devait peut-être se faire en partie depuis un puits découvert à quelques mètres. Quatre de ces structures ont conservé leur cuvelage en bois, fait de branchages tressées (clayonnage) ou de tonneaux en réemploi. En outre, un plancher utilisé comme aire de travail (à moins qu’il s’agisse d’une partie d’un tonneau démantelé) a été découvert presque intact au contact de l’une d’elles. Ni la fonction exacte, ni la contemporanéité de ces cuves ne sont pour le moment établies. Cependant, l’utilisation d’eau en quantité importante dans un système de structures interconnectées sur différents paliers altimétriques laisse envisager plusieurs types d’artisanat, parmi lesquels la tannerie, la vannerie ou la foulonnerie. En effet, dans le cadre de ces activités artisanales, des petits bassins sont respectivement utilisés pour le trempage et le traitement des peaux, pour le rouissage de branches, pour le lavage de la laine ou la teinture des tissus, etc. Des analyses chimiques sont en cours sur des prélèvements de sédiments, qui seront couplées avec des études palynologiques et carpologiques. Ces études spécialisées vont tenter de déceler un marqueur spécifique qui pourrait éventuellement préciser l’un ou l’autre de ces artisanats. Enfin, l’analyse dendrochronologique des bois conservés permettra, on l’espère, de caler chronologiquement les activités de cet atelier, unique dans la région et exceptionnellement bien conservé.
Une riche domus
Le bâtiment sis en bordure de rue connaîtra plusieurs transformation tout au long des Ier et IIe s. ap. J.-C. se traduisant par un agrandissement progressif de la surface au sol et une réorganisation de ses pièces intérieures. Les vestiges se rattachant à l’état le plus récent comprennent une série de locaux se développant en terrasse, comme le montre la différence d’altitude de près d’un mètre entre la partie sud de la maison et sa zone médiane. Ces pièces sont pour la grande majorité pourvues d’un sol en mortier de chaux et de peintures murales richement décorées. Une pièce tempérée par un système de chauffage au sol (L 13) a également été dégagée dans la zone haute de l’habitation. De plus, une grande cour-jardin à ciel ouvert (L 6) se distingue au centre du plan. Un couloir en «L » (L 8) ceinture cet espace extérieur jusqu’à aboutir à un grand local (L 19) de 42 m2. Plusieurs fragments de placage de marbre importé ont notamment été trouvés, témoignant d’une décoration pariétale de belle qualité. Un couloir secondaire (L 15), débouchant sur des escaliers, permet la circulation entre la partie sud de la demeure et la partie centrale. Un hypothétique portique (L 2) ferme l’extrémité nord de la demeure. Il s’ouvrirait sur un jardin (L 1), dont seule une petite partie a été fouillée. Enfin, plusieurs canalisations d’évacuation d’eau ont été observées vers l’extrémité nord de la fouille, dont quatre avec un canal maçonné doté d’un fond de tuiles posées à plat. L’importante quantité et diversité de mobilier exhumé durant cette intervention manifeste également la prospérité des propriétaires de la demeure. Près de cinq cents objets, parmi lesquels une vingtaine d’artefacts se rattachant au domaine militaire, dont deux glaives (un avec un pommeau en ivoire) et de nombreux éléments d’harnachement, ainsi que plusieurs milliers de tessons de céramique ont été mis au jour.
En parallèle de cet important chantier, à l’autre bout d’Avenches, des fouilles préventives de durées et d’emprises plus réduites ont été menées en deux secteurs du site à l’ouest de la colline.
Collège de Sous-Ville
La poursuite des travaux d’agrandissement du collège de Sous-Ville, situé sur le flanc nord-ouest de la colline d’Avenches, a entrainé des terrassements sur une surface d’environ 1300 m2 pour la construction d’une nouvelle école primaire en lieu et place de deux courts de tennis. Le suivi du décapage par les archéologues a montré que l’intégralité de la parcelle avait déjà été passablement perturbée lors de la construction dans les années 1970 de l’actuel collège et que probablement à la même époque un épais remblai avait été déposé pour le nivellement nécessaire à l’aménagement des courts de tennis. Plusieurs fonds de structures en creux ont néanmoins été repérés. Celles-ci donnent de précieux compléments d’information sur l’habitat gaulois de ce secteur qui, on le voit fouilles après fouilles, prend de l’importance sur ce versant de la colline. Trois d’entre elles, dont un cellier, ont livré un important mobilier céramique qui permet de les dater aux alentours de 100 av. J.-C. En outre, l’abondante quantité de petits fragments de torchis brûlés portant des empreintes de clayonnage trouvés dans les comblements laisse supposer une architecture domestique de terre et de bois. L’emploi systématique d’un détecteur à métaux a permis de récolter dans les remblais modernes, ainsi que dans la faible épaisseur de couche encore en place un abondant mobilier, bien qu’en majorité en position secondaire et chronologiquement mélangé. On compte 40 petits objets inventoriés et 61 monnaies datées des époques médiévale, romaine et de la fin de l’âge du Fer.
Site de l’ancienne brocante d’Avenches
(cf. actualité printemps-automne 2018)
Les derniers travaux d’équipement des trois locatifs construits entre 2018 et 2019 à l’emplacement de l’ancienne brocante d’Avenches a nécessité un suivi systématique du creusement des tranchées (réseau d’eau et d’électricité, raccordement au thermoréseau et bassin de rétention des eaux de ruissellement). Les travaux de cette étape ont été très morcelés et se sont étendus sur plusieurs mois. L’étroitesse des tranchées, de même que leurs profondeurs variant de quelques dizaines de centimètres à près de 1,50 m sous le tout-venant, n’ont pas facilité les observations et la documentation archéologiques. Malgré cela, les vestiges mis au jour nous apportent de nombreux compléments sur ce secteur périphérique d’Aventicum, notamment pour les époques gauloise et romaine. Au moins quatre fosses sont attribuées à La Tène finale par leur insertion stratigraphique et leur mobilier céramique. Une tombe à inhumation peut vraisemblablement être rattachée à la nécropole romaine de la porte de l’Ouest. De plus, plusieurs fragments de monuments funéraires en calcaire blanc très morcelés, principalement trouvés dans la partie orientale de la parcelle, peuvent être associés à ce cimetière. Parmi ceux-ci, on relèvera la remarquable et peu fréquente découverte de trois grands fragments de stèles figurant des défunts.
Printemps 2019
Route du Faubourg 13
En prévision de l’installation d’une nouvelle citerne pour la station d’essence de la Route du Faubourg 13, une fouille préventive a été organisée en mars 2019, sur une surface relativement restreinte d’environ 75 m2 et sur une impressionnante profondeur de 4 m. L’intervention a mobilisé cinq archéologues durant huit semaines.
Située à moins de trente mètres de la mosaïque découverte l’année passée lors des travaux réalisés dans la chaussée de la route de contournement, cette zone a révélé une densité de vestiges exceptionnelle s’étendant sur près de quinze siècles d’histoire. Outre un grand fossé post-médiéval de près de 5 m de large et profond de 2,5 m, traversant d’est en ouest le secteur fouillé, les investigations dans cette aire voisine du cimetière avenchois ont permis la mise au jour de sept tombes médiévales et modernes, ainsi que deux murs appartenant au complexe cimétérial de l’ancienne église paroissiale de Saint-Martin. On peut de ce fait distinguer deux à trois phases d’utilisation de cette zone dont la vocation funéraire est attestée par les sources historiques au 15e siècle, mais qui est assurément bien antérieure.
Recoupés par plusieurs de ces tombes, les vestiges de la période romaine sont représentés par trois murs maçonnés servant d’appui à des élévations en matériaux légers, dont deux délimitent des locaux équipés en béton de chaux. De plus, une cour intérieure, dont le portique est matérialisé par deux tambours de colonne en molasse, a été identifiée au Nord-Ouest du sondage.
Enfin, sous les vestiges romains, à une profondeur de 3 m, une dizaine de structures en creux attestent de l’occupation de la zone à la fin de la période celtique, peu avant notre ère, et confirment de ce fait l’importance de l’agglomération gauloise dont l’étendue ne cesse de s’élargir depuis la découverte en 2014 de l’extraordinaire site du Faubourg (actualité internet printemps-automne 2014) situé à 150 m de là plus à l’ouest. Une vocation de stockage (silos et tonneaux) peut être proposée pour plusieurs grandes fosses circulaires, tandis qu’un foyer, deux sablières basses, ainsi que des trous de poteau attestent la présence d’un petit bâtiment en construction légère, à soubassement en bois et parois de torchis.
Printemps-automne 2018
Le démarrage simultané début avril de plusieurs projets de construction a entraîné une mobilisation permanente des archéologues du Site et Musée romains d’Avenches sur le terrain. Rapide tour d’horizon de ces différents chantiers pour lesquels une quinzaine de collaborateurs auxiliaires ont été appelés en renforts.
Route de Lausanne 5-7
Au sud-ouest de la colline d’Avenches, la parcelle où s’élevait encore récemment l’ancienne grange du Paon, utilisée en dernier lieu comme brocante, a fait l’objet, dès août 2017, de plusieurs mois de fouilles qui ont permis d’enrichir notre connaissance de l’occupation pré-romaine du site. Hormis deux sépultures d’époque romaine et quelques aménagements contemporains du bâtiment du 17e s., l’intervention s’est en effet essentiellement concentrée sur des vestiges de la seconde moitié du 1er s. av. J.-C. Le principal élément de cette période est un chenal fossile exploré sur une douzaine de mètres. Cet ancien ruisseau dont le cours a varié au cours du temps présente divers aménagements destinés à en renforcer les berges, sous forme d’empierrements et d’éléments en bois relativement bien conservés, poteaux, piquets et planches. Quoique effectuée dans des conditions particulièrement difficiles (ce paléo-chenal draine aujourd’hui encore les eaux souterraines des coteaux voisins), la fouille a livré un assemblage tout à fait remarquable de mobilier tant céramique que métallique (nombreuses fibules et monnaies, situle en bronze, etc…) ou encore faunique (crânes de bovidés et de cheval), ainsi que la partie supérieure d’un crâne humain isolé. Différentes pièces de vannerie particulièrement bien conservées ont été mises au jour ainsi qu’une brosse qui pourrait être en relation avec un artisanat du textile. Des empreintes laissées par des bovidés autour de cuvettes creusées dans le terrain encaissant et alimentées par une déviation du ruisseau indiquent en outre que le lieu a servi occasionnellement de point d’eau pour le bétail.
Parking du Faubourg
Sur les autres chantiers, hormis quelques nouvelles structures en fosses repérées dans le secteur déjà exploité en 2016 et 2017 du collège municipal de Sous-Ville, c’est au sud-est de la colline cette fois-ci que sont apparus de nouveaux témoins d’une occupation antérieure à la ville romaine. Observés lors de travaux pour la création d’un parking sur un terrain voisin du cimetière qui n’avait jamais été fouillé jusqu’alors, il s’agit de plusieurs grandes fosses et fossés riches en mobilier (céramique, faune) que l’on peut mettre en relation avec un premier habitat en architecture de terre et de bois. Datées aux environs des années 40-20 du 1er s. av. J.-C., ces constructions ont été supplantées dans le courant du siècle suivant par des habitations établies selon la même orientation en bordure d’une rue qui se dirigeait vers la zone sacrée du Lavoëx. Bien conservés, ces vestiges qui comprennent notamment plusieurs sols de béton associés à des foyers relèvent de plusieurs phases d’occupation et apportent un éclairage tout à fait inédit sur l’urbanisation à l’époque romaine de cette région située hors des quartiers réguliers de la ville.
Place de la Gare - Aventica
Les investigations menées sur une parcelle où s’élevaient jusqu’en été 2017 les bâtiments de l’ancienne usine Aventica (place de la Gare) marquent le retour des fouilles extensives en ville romaine. Cette opération qui aura mobilisé une dizaine d’archéologues auxiliaires durant sept mois, a permis l’exploration, en périphérie des quartiers antiques et à une centaine de mètres du mur d’enceinte, d’une zone d’env. 4000 m2 située au nord d’une rue large d’env. 7 m dans son état final. Alors que la fouille vient à peine de s’achever, un premier bilan très général fait état de trois ou quatre grandes phases d’occupation dont la plus ancienne ne semble pas antérieure au 1er siècle de notre ère. Elle comprend essentiellement des bâtiments en terre et en bois associés à de nombreuses fosses ainsi que quelques puits et foyers. Le plan de cette première période laisse deviner une subdivision des surfaces en plusieurs parcelles qui sera partiellement maintenue par la suite. Suivent une ou deux phases de constructions en architecture mixte (parois légères sur fondations maçonnées), dont certaines des pièces, aux sols de terre battue ou en béton de chaux, étaient ornées d’un revêtement mural peint de grande qualité. Les constructions maçonnées du dernier état correspondent à plusieurs corps de bâtiments dont la façade se développe côté rue sur près de 70 m. Des pièces chauffées par hypocauste et des locaux dotés de sols de béton caractérisent les parties les mieux conservées de ces édifices à l’arrière desquels des espaces ouverts étaient occupés par des constructions sur poteaux pouvant abriter des activités domestiques ou artisanales.
Route de contournement d’Avenches (RC 601)
Les travaux nécessitant l’ouverture d’une tranchée longue de 550 m dans la chaussée sud de la route de contournement d’Avenches ont fait l’objet depuis début avril d’un suivi archéologique continu visant à préciser et compléter les observations faites au début des années 1960 lors de l’élargissement de l’ancienne route du Faubourg.
Le quartier des sanctuaires
Près de l’intersection avec l’Avenue Jomini, d’imposantes maçonneries ont été exhumées de part et d’autre du decumanus maximus, principale voie conduisant à la ville depuis l’ouest. Il s’agit d’une section du mur d’enclos du temple de la Grange des Dîmes, et, lui faisant face, des fondations massives d’un bâtiment à double galerie ou portique qui longeait la chaussée romaine sur env. 150 m de longueur.
La voirie
La chaussée romaine qui contournait la colline par le sud-est et dont le tracé a été déterminé par une voie pré-romaine (fouilles du Faubourg 2014) a été recoupée en plusieurs secteurs. Apparue par endroits à moins d'un mètre sous le coffre de la route de contournement, elle est constituée comme partout ailleurs à Aventicum de chapes de graviers et de galets qui se sont succédé sur une épaisseur pouvant atteindre plus de 1 m. Face au temple de la Grange des Dîmes, implantée sous ces niveaux de voirie une canalisation en plomb parfaitement conservée à son emplacement d’origine été dégagée sur plusieurs mètres. Grâce à l’ingéniosité et au savoir-faire du Laboratoire de conservation-restauration du SMRA, un segment long de 5,30 m de cette conduite de 6 cm de diamètre intérieur a pu être prélevé. La plus grande partie des objets en plomb ayant été systématiquement récupérés à la fin de l’Antiquité, cette découverte est tout à fait remarquable.
Des sépultures du Haut Moyen Age
Les terrassements effectués à la hauteur du Chemin du Selley ont permis de repérer trois sépultures implantées au sommet des niveaux de route tardo-antiques. Entourées d’une bordure de moellons de calcaire jaune, elles s’apparentent à certaines des inhumations datées entre le 9e et le 11e siècle présentes en différents points du site d’Avenches, notamment aux abords du temple de la Grange des Dîmes, distant de 200 m.
Des édifices en bordure de rue
Plus loin, entre le quartier des sanctuaires entre l’entrée ouest de la ville, les vestiges de constructions établies au sud de la voie romaine ont été relevés à plusieurs reprises. La fenêtre d’observation de ces maçonneries et des niveaux de sols qui leur étaient associés était toutefois trop étroite pour permettre d’en esquisser le moindre plan. A l’évidence toutefois, on se trouve souvent en présence de bâtiments d’un certain standing. C’est notamment le cas à la hauteur de l’allée d’accès au cimetière, où plusieurs murs et sols de béton déjà signalés lors des fouilles des années 1960, ont été recoupés par les travaux, ainsi qu’une pièce chauffée par hypocauste.
Une mosaïque exceptionnelle
C’est à quelques mètres à l’ouest de ce local, à 1,80 m de profondeur, qu’a été mise au jour une mosaïque d'un intérêt exceptionnel. Son bon état de conservation tient sans doute au fait qu’elle a été protégée par des aménagements d’une phase d’occupation plus tardive, qui comprend une petite pièce avec sol maçonné, voisine d’un local chauffé par le sol qui se développe sous la chaussée actuelle. Ce nouveau pavement associe de manière tout à fait originale et à ce jour sans parallèle connu, un tapis central d’une grande finesse d’exécution, décoré de motifs végétaux et géométriques riches en couleur, et une large bordure de tesselles jaunes parsemée de plaquettes en remploi de marbres colorés d’importation. Au centre de ce tapis de 1,55 m de côté, un médaillon circulaire met en évidence le motif principal du pavement : un récipient (canthare) sur lequel deux oiseaux sont perchés. Prélevée au terme d’une impressionnante opération menée avec brio par le Laboratoire de conservation-restauration, cette mosaïque s’impose d’ores et déjà comme une pièce unique au sein des collections du Musée.